Projet PAC : Pédagothèque Adaptée au Cursus

Présentation et retour sur le Projet PAC : Pédagothèque Adaptée au Cursus.

Contexte du projet

Lors de la création des Universités numériques thématiques (UNT), nous avons cru que des contenus d’excellente qualité mis sur le web suffiraient à leur usage massif par les enseignants et donc par les étudiants. Avec quelques années de recul, le paradigme a changé et nous nous sommes rendus compte que la valeur intrinsèque des ressources pédagogiques ne suffit pas. Nous avons repéré trois obstacles à l’usage des ressources des UNT. Nous avons mené un travail d’analyse de ce phénomène:

  • La première difficulté réside en la complexité liée à la recherche et à la surabondance d’informations pédagogiques sur internet, la diversité des portails des UNT. Malgré les efforts faits autour de la valorisation des ressources par une norme d’indexation adaptée aux ressources pédagogiques (LOMFR), une réflexion pour son adaptation à l’enseignement supérieur (SupLOMFR) et des moteurs de recherche dédiés, ces initiatives ne garantissent pas un plus grand usage. Ils rendent la recherche de ressource pédagogique plus aisée par des recherches sur des critères utiles comme le type de ressource, le niveau ou la discipline. Mais rendre possible la recherche de document sur un certain nombre de portails n’entraine pas sa pratique régulière. Sans formation et sans recherche documentaire régulière à faire dans son cursus, l’étudiant ne peut pas acquérir une aisance à utiliser ces outils. L’amélioration des moteurs de recherche de ressources pédagogiques par des technologies issues du web sémantique, permettront peut-être dans quelques années de pallier à certaines difficultés.

  • Le deuxième obstacle est d’ordre culturel. Dans la culture du monde pédagogique en France, le contenu de cours est assimilé aux enseignants eux-mêmes, c’est leur vision qui est délivrée. Contrairement au modèle anglo-saxon dans lequel l’enseignant et le contenu sont dissociés : le professeur utilise le cours de référence sur le sujet et apporte des compléments, on parle de « textbook » ou « coursebook » ; le travail de l’enseignant ne résidant pas dans le contenu de son enseignement mais dans la manière de le délivrer. Cette culture permet une réutilisation par morceau, ce qui existe peu en France où les enseignants ne sont pas prescripteurs de documents pédagogiques puisqu’ils sont en auto-suffisance.

  • Le troisième problème réside dans la pratique utilitariste des étudiants liée à une évolution sociétale. Les étudiants n’ont pas soif de connaissance mais de diplôme. Globalement, ils ne vont pas plus loin que ce que les enseignants demandent et cherchent peu à se former par eux-mêmes. (Ce que confirme notre enquête de 2010.) De plus les conditions d’évaluation favorisent une reproduction fidèle des connaissances transmises par les réponses les plus proches possibles de celles de l’enseignant. Ces modalités d’examen ne développent pas chez les étudiants de capacité à aller plus loin que leurs cours mais entraine un comportement de conformité.

Partant de l’analyse de ces obstacles, nous avons fait l’hypothèse que plus les ressources seront proches des formations plus l’étudiant sera amené à les utiliser. Le principe de ce projet est de répondre aux 3 difficultés citées ci-dessus. En premier lieu en supprimant la complexité de la recherche en faisant des liens avec le cursus de formation de l’étudiant. En deuxième lieu en faisant un travail de communication sur ce que peuvent apporter les ressources de l’UNT, on aide l’enseignant à mieux se les approprier et à essayer de voir comment elles peuvent s’accorder avec ses unités d’enseignement. Par cette initiative, il s’agit de donner du sens aux ressources en leur donnant un contexte d’utilisation. En troisième lieu, en organisant la prescription par l’enseignant ou l’établissement on répond ainsi aux habitudes d’apprentissage des étudiants.

Mise en œuvre du projet : Phase 1 : Expérimentation

Nous avons mis en place une expérimentation avec quelques établissements volontaires qui consiste en la mise en correspondance des programmes des unités d’enseignement de licence 1 et des documents pédagogiques numériques d’Unisciel. Les établissements volontaires pour cette expérimentation sont les suivants : l’UTC, les universités de Bordeaux1 et d’Angers. Nous nous sommes pour le moment limités au L1, seule la L2 de l’UTC a été traitée. Les premières phases de ce travail sont expliquées ci-dessous, les deux premières ont été mises en œuvre par la documentaliste d’Unisciel avant l’intégration du projet de manière concrète dans les établissements.

Repérage des manques par disciplines

Pour repérer les thématiques non couvertes par les ressources Unisciel et donc inutiles à rechercher dans la seconde phase du projet, un travail préparatoire a été fait à partir des classifications disciplinaires. Une consultation de chaque branche a été faite ainsi qu’un repérage de chaque thématique vide.

Collecte, tri des UE et correspondances avec les ressources

Les référents de chaque établissement ont envoyé des documents descriptifs des UE de L1 (description de l’enseignement, thématiques abordées, mots clés). Les UE ont été classées par disciplines et des recoupements ont été faits entre celles des différents établissements lorsqu’elles traitaient des mêmes thèmes. Un travail a été fait autour du vocabulaire de ces descriptifs, en effet si la ressource pédagogique numérique et le descriptif d’UE ont un vocabulaire commun, on peut postuler que les conceptions des enseignants seront proches.

Pour chaque UE ou groupe d’UE lorsqu’elles traitent du même sujet, une correspondance a été faite avec les branches de la classification Unisciel afin de permettre une mise à jour ultérieure qui permette de trouver avec le même chemin les nouvelles ressources.

Une recherche et sélection des liens des ressources grâce aux branches sélectionnées dans l’étape précédente. Un complément par une recherche par mot clé a été faite si nécessaire.

Validation et mise en œuvre par les établissements

Les approches ont été très diverses selon les établissements. Les trois établissements ont proposés des stratégies de déploiement très différentes. Cependant les difficultés sont ressemblantes : le cadre organisationnel est complexe et l’environnement est peu favorable : surcharge de travail des enseignants ou encore réticence disciplinaire.

On peut voir 3 niveaux d’intégration de ce projet :

  • Niveau 1 : médiathèque de ressources pédagogiques pour les L1 et L2. Deux des trois obstacles cités dans notre première partie contexte sont résolus grâce à la recherche simplifiée de ressources, les étudiants ont plus de facilité à trouver eux-mêmes des ressources.
  • Niveau 2 : lien entre ressources et unités d’enseignement ce qui implique une participation de l’enseignant et résout la majorité presque toutes nos difficultés citées dans le partie contexte.
  • Niveau 3 : Proposition de parcours de formation personnalisé par l’intégration de documents complémentaires qui peuvent apporter une aide adaptée aux difficultés rencontrées par l’étudiant lors de l’enseignement. L’enseignant devient prescripteur d’activités pédagogiques pour remédier à une difficulté.

A titre d’exemple voici les retours d’expérimentation des établissements testeurs:

UTC 

Création d’une maquette médiathèque de ressources pédagogiques en accord avec les responsables pédagogiques du tronc commun (3 entrées : thématiques, activités et types de documents). L’entrée par thématiques a été choisie pour ne pas faire de liens directs avec les UV pour le moment. Ce travail correspond au niveau 1 exposé ci-dessus. Ce travail est accessible à cette adresse : http://cap.utc.fr/pedagotheque/

L’accès aux ressources par les unités d’enseignement est envisagé dans un second temps dans une approche plus globale s’inscrivant plus fortement dans la stratégie de l’établissement et de renouvellement de l’innovation pédagogique dans l’établissement.

Université de Bordeaux 1

Le choix a été fait de laisser libre chaque enseignant d’adhérer à cette démarche. La stratégie de déploiement à Bordeaux ne comprend pas le niveau 1 tel qu’il a été pensé à l’UTC, car c’est une approche directe au niveau de l’enseignant. L’approche est directement de niveau 2 et 3 mais elle pose un problème d’élargissement dans les différentes disciplines dépendant des enseignants et des équipes pédagogiques.

Université d’Angers

Le projet n’a pas suscité initialement un enthousiasme fort de la faculté des sciences. Néanmoins celle-ci, consciente des enjeux a organisé des réunions par discipline pour favoriser la mobilisation. Malgré ce début un peu difficile, la suite du projet prend bien meilleure tournure. La présentation du projet au département de physique a reçu un accueil favorable des personnes présentes même si elles étaient peu nombreuses ; l’idée de médiathèque de ressources pédagogiques (niveau1 comme à l’UTC) convient aux enseignants. Ce qui confirme que ce niveau peut être qualitatif pour les enseignants tout en étant moins impliquant pour eux. Ils ont même demandé que cette banque de ressources soit élargie aux années L2 et L3. Le projet a donc fait ces premiers pas et a abouti à une réalisation visible en suivant ce lien:
http://moodle.univ-angers.fr/file.php/1/pedagotheque_sciences/co/enseignements.html

Mise en œuvre du projet : Phase 2 : Déploiement

Suite au succès de cette expérimentation, nous avons décidé de poursuivre ce travail en proposant à tous les partenaires d’Unisciel de participer. L’enjeu pour Unisciel est de permettre aux établissements d’optimiser les chances de réussite en licence des étudiants, afin de favoriser leur accès au diplôme. Ceci en mettant à leur disposition des ressources correspondant à leur cursus sur le double critère d’apport de connaissances et de la culture pédagogique de l’établissement, de la discipline et de l’enseignant.

Collecte, tri des UE et correspondances avec les ressources

Nous avons fait appel à nos partenaire par le biais de nos correspondants, 6 universités ont répondu favorablement : Aix-Marseille, Le Mans, Lille1, Montpellier2, Paris5 Descartes et Haute Alsace, en plus des 3 ayant participé à l’expérimentation l’année passée : Angers, Bordeaux1, UTC. Le premier travail a consisté à établir une cartographie des enseignements de sciences, semestre par semestre. Cette première étape présuppose que les établissements aient mis en œuvre un dispositif de descriptif des unités d’enseignement (UE) qui soit suffisant pour être opératoire. En effet, l’offre de formation est présentée de manière hétérogène. Il y a plusieurs possibilités pour résoudre cette difficulté, la première est de mener un travail avec l’établissement, les composantes ou directement avec les enseignants.

Lors de l’étape suivante, nous utilisons la méthodologie suivante. Le premier travail est d’évaluer le dispositif de description des UE, s’il est suffisant, la documentaliste analyse et extrait des mots clés pour chacune. Il est possible de faire des regroupements entre les UE de plusieurs établissements participants. Ensuite il s’agit de rechercher les ressources pertinentes suivant les thématiques et surtout le niveau. Ce test de cohérence s’effectue grâce aux informations pédagogiques présentes sur la fiche LOM et à une consultation de la ressource.

Validation des enseignants et mise en œuvre par les établissements

Suite à ce travail, la documentaliste transmet ces liens aux référents de l’établissement avec une sélection pour chaque UE de cours, exercices ou compléments. Ensuite, une phase de rétroaction est indispensable, il s’agit de repérer des écarts entre les ressources proposées et le contenu de l’enseignement, ce travail ne peut être fait que par un référent enseignant. Cette étape permet une démarche qualitative par une mise en adéquation des liens et une cohérence avec les objectifs de l’établissement. Les ressources d’Unisciel sont nombreuses mais certaines disciplines sont mieux couvertes que d’autres, aussi pour certaines UE, aucune ressource ne pourra être rattachée. Cette détection des manques nous permettra d’orienter les prochains appels d’offres, en menant une réflexion en terme de collection de ressources. Le nombre d’étudiants (et donc d’enseignants) par discipline et thématiques a aussi son importance, en effet elle peut montrer quels sont les manques thématiques pour un grand nombre d’acteur.

La mise en œuvre sera laissée à la libre appréciation des établissements partenaires, les liens pourront être implémentés en fonction des usages et des souhaits des équipes enseignantes. Certains ont décidé de créer un espace dédié, d’autres veulent le mettre en place dans leur plate-forme pédagogique. Comme nous l’avons expliqué dans notre partie contexte, cette opération n’est pas neutre et bouscule la place du document dans l’enseignement universitaire français. Afin de permettre l’acculturation sur le positionnement du document pédagogique et de l’enseignement, le document ne doit pas être associé à l’enseignant. On peut penser à certains projets soutenus par Unisciel de communautés d’enseignants qui co-produisent et utilisent par la suite des ressources, comme en maths le projet Braise.

Les réalisations 2012:

Le déploiement concret commence à avoir lieu dans les établissements partenaires, le premier visible en plus des établissements expérimentateurs (Université d’Angers et de l’Université de Technologie de Compiègne) est l’Université de Haute Alsace dont la PAC est accessible à cette adresse: https://www.e-formation.uha.fr/moodle/file.php/363/s00acroot/ac00module1_web.publi/webunisLatex/co/ac00module1_web.html?inpopup=true

Dans les universités du Mans, d’Aix-Marseille, de Lille1 et de Montpellier2, la participation au projet a été menée directement auprès des enseignants, de la même façon que Bordeaux1 dans le cadre de l’expérimentation, aussi l’utilisation des liens que nous avons proposé ne donne pas lieu à une réalisation de site visible depuis l’extérieur (mise à disposition sur la plateforme etc).

A Paris Descartes, l’UFR de mathématique et informatique qui participe au projet a choisi une mise en œuvre sous forme de wiki dans lequel les enseignants pourrons commenter les liens et interagir directement avec les documentalistes. Cette méthode a pour objectif de fluidifier les échanges avec les enseignants tout en facilitant une certaine supervision. Une fois validés, les liens vers les ressources seront transférés sur les cours Moodle correspondants.

Une mise à jour annuelle des liens proposés aux partenaires est envisagée.

Un parcours « type »

En fonction des 3 scénarios précédemment évoqués. Le premier niveau est une approche de « bibliothèque numérique », sans beaucoup d’adhésion des enseignants. Une seconde qui est une validation de la pertinence par les enseignants qui permet pleinement une phase de rétroaction sur la qualification de la ressource. Le troisième niveau qui est l’intégration de la ressource comme élément pédagogique dans le cursus enseigné, amènera sans doute une demande de découpage de la ressource pour n’en prendre qu’un petit élément. Notre objectif est de couvrir la première et la deuxième année de Licence.

Néanmoins nous savons que nous ne toucherons pas tous les établissements, il est donc important pour les étudiants de ces établissements qui veulent bénéficier des ressources d’appui de pouvoir retrouver sur une structure type de cursus les documents les plus appropriés pour eux. Nous avons fait une analyse fine des UE des partenaires afin d’offrir un cursus type par discipline auquel pourront se référer les étudiants isolés. Ce travail aura une efficacité moindre mais permettra de répondre à une préoccupation des étudiants en faisant un cursus type qui offrira un accès aux ressources plus structurant et plus structuré proche de l’utilisation du guide d’étude de l’Université en ligne.

Ce travail est accessible sur notre site : http://pac.unisciel.fr/

 

Le premier rôle des UNT de créer des ressources et de mettre les universités françaises à niveau en terme de production de ressources pédagogiques numériques a été rempli. La nouvelle mission donnée aux UNT qu’est le développement des usages du numérique, passe par une capacité à identifier, fédérer, mutualiser et diffuser les bonnes pratiques permettant le développement de ces usages. La PAC est l’illustration d’une de ces bonnes pratiques qui permet d’offrir aux étudiants des ressources labellisées adaptées à leur désir de réussite de leur cursus et au contexte de l’établissement. Cette action est rendue possible par la mutualisation des UNT ; leur rôle étant dans ce cadre d’anticiper sur les réponses et d’accélérer les prises de conscience des établissements sur ce que le numérique pourrait apporter.

La PAC n’a rien d’innovant en soi, si ce n’est qu’elle répond pragmatiquement à une nécessité réelle des étudiants et des établissements tout en apportant l’économie du dispositif. Elle ne fait que fédérer des actions entreprises par des enseignants ou des composantes et ceci par la capacité qu’offrent les UNT à repérer, structurer, amplifier, diffuser des initiatives intéressantes. Plusieurs partenaires se sont déjà portés volontaires pour participer et vous pouvez rejoindre cette action en nous contactant.